Le dernier train de Gun Hill (John Sturges, 1959)

Un shérif veut venger sa femme violée et assassinée. Problème: le coupable semble être le fils de son ami de jeunesse devenu le plus gros éleveur de la région.

Comme le montre l’argument dramatique, il s’agit d’un western qui se veut tragique. C’était la tendance en cette fin des années 50. La question est de savoir si l’exécution suit les intentions. Il se trouve que non. Ok, Le dernier train de Gun Hill est ce que l’on appelle couramment un « film de bonne facture ». Le face-à-face entre Kirk Douglas et Anthony Quinn vaut le coup d’oeil, la mise en scène est soignée, le film se suit agréablement. Bref, ce n’est pas mauvais du tout (par exemple, c’est nettement mieux que Les Sept mercenaires ou Règlements de compte à O.K Corral).

Seulement, si la mise en scène est soignée, elle est aussi essentiellement illustrative. Il faut voir par exemple la façon dont sont réalisées les fusillades dans l’hôtel, la façon attendue dont Kirk Douglas abat les méchants. Il y a ici quelque chose d’indubitable, de profondément mécanique du fait d’une convention jamais dépassée ni creusée. Comparer ces séquences à celles analogues mises en scène à la même époque par Anthony Mann pour se rendre compte ce qui sépare un artisan méritant mais sans inspiration d’un maître classique qui donne une substance inédite aux passages obligés du genre. De plus, la narration aurait gagnée à être épurée, dégraissée des ornements psychologiques et des intrigues secondaires qui ne font que diluer l’intensité tragique du drame dans des scènes de parlotte sans intérêt.

L’aigle à deux têtes (Jean Cocteau, 1948)

La rencontre entre une reine recluse et un anarchiste venu pour la tuer qui ressemble étrangement au défunt roi.

Les films de Jean Cocteau ne sont jamais aussi bons que lorsque leur cadre est irréel. Cet axiome est vérifié aussi bien par le lamentable échec d’Orphée, ré-actualisation germanopratine du mythe grec, que par l’éblouissante réussite de La belle et la bête, simple mise en images du conte. Avec cet inoxydable classique, L’aigle à deux têtes est l’autre grand film de Cocteau.

Plus encore que son illustre prédécesseur, c’est un triomphe de la sophistication. Des dialogues précieux aux somptueux décors en passant par les incroyables péripéties dramatiques, tout ici respire l’artifice le plus apparent. Et pourtant, ça fonctionne! C’est artificiel mais ce n’est jamais faux. Cocteau nous balade dans les arabesques d’une mise en scène sublime pour mieux dévoiler la vérité tragique des sentiments. On est dans la plus pure des poésies. Rarement couple de STARS aura été plus beau que celui formé ici par Jean Marais et Edwige Feuillère. Au final, c’est une terrible mélancolie qui sourd de la luxuriance de L’aigle à deux têtes.

Message à caractère informatif

Je romps la belle continuité de ce blog pour vous annoncer que le Napoléon d’Abel Gance sera projeté à la Cité de la musique le dimanche 13 décembre à 15 heures.
Copie restaurée, orchestre symphonique, triple écran et tutti quanti. Ca faisait dix ans que j’attendais une telle projection pour découvrir ce film dans les conditions qui lui sont dues. Je me suis dit que la nouvelle pourrait intéresser mes lecteurs qui sont -forcément- des gens sensibles et de bon goût. D’avance, je demande pardon aux gens qui habitent loin de Paris pour l’éventuelle frustration engendrée par cette annonce.

Baccara (Yves Mirande, 1935)

Une jolie étrangère entretenue par un banquier véreux se voit proposer par son avocat un mariage blanc avec un joueur fauché.
Derrière l’écriture théâtrale, il y a une peinture de la société française de l’époque des plus acides. Face à la pourriture généralisée des institutions bourgeoises (scandales financiers, mépris des héros de la Grande guerre…), les sentiments individuels constituent le meilleur des remparts. La morale de Mirande est désabusée mais ses personnages sont beaux. Dans un rôle qui n’est pour une fois pas celui d’un coquin, Jules Berry est simplement immense. C’est un monstre de classe. Quelle élégance dans la tenue, dans la diction, dans la façon de bouger…Sa camaraderie avec son copain de tranchées pourra facilement paraître aux yeux d’un spectateur de 2009 à la limite de l’homosexualité mais la très belle fin façon Jules et Jim montre que les rapports entre les trois personnages échappent aux interprétations les plus hâtives tout en affirmant  la singularité d’un film décidément attachant.

Un jour à New-York (On the town, Gene Kelly et Stanley Donen, 1949)

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Les marivaudages de trois marins pendant une permission de 24 heures à New-York.

Une comédie musicale qui brille par son esprit juvénile et hédoniste. En effet, il ne faut pas se laisser avoir par les apparences sucrées du genre. Les marins n’ont qu’une idée en tête: baiser. Le film n’est jamais que la mise en scène des différentes manoeuvres des trois hommes pour arriver à leurs fins. Il n’y a aucune mièvrerie. Dans un mouvement gentiment anarchiste, les auteurs opposent à la fougue des jeunes gens la bêtise des policiers municipaux, policiers sortis tous droits d’un court-métrage de la Keystone.

Perfection du rythme, perfection des chorégraphies, perfection de la mise en scène. Le miracle est que la maîtrise absolue de Kelly et Donen (qui n’avait alors que 25 ans!), loin d’étouffer la vitalité de leur matière, l’avive prodigieusement. N’est-ce pas là le secret de la réussite d’un musical? Réalisme et onirisme sont maniés au gré de la fantaisie des audacieux créateurs qui ont régénéré le genre pour les dix ans à venir. Avec ce classique éblouissant qui n’a rien perdu de sa force, la comédie musicale entrait dans un nouvel âge d’or, âge d’or placé sous la houlette du génial producteur Arthur Freed.

L’Africain (Philippe de Broca, 1983)

Pour le compte du Club Med, une femme part au fin fond de l’Afrique avec l’intention de construire un hôtel. Là-bas, elle va retrouver son ancien mari.

Comédie d’aventures dans la grande tradition de Broca. La partie « aventures » est convenue mais la partie « comédie » est délicieuse. L’Africain n’est ni plus ni moins que la meilleure comédie de remariage française. J’ose d’autant plus l’affirmer qu’il n’est pas loin d’être seul dans sa catégorie. Que ce soit lors des échanges piquants du début ou au moment de la danse au milieu de la brousse – moment suspendu dans le temps typique de de Broca qui permet à l’auteur de donner une profondeur sentimentale à ses personnages typés et brinquebalés par l’intrigue- l’alchimie entre Catherine Deneuve et Philippe Noiret emporte le morceau. La vérité de leur couple est celle du film.

Avec un tel sujet, on aurait pu craindre le message tiers-mondiste ou lénifiant mais il n’en est rien. Philippe de Broca, qui a été pilote dans la brousse, a l’intelligence d’éviter tout pêchi-prêcha et reste focalisé sur son couple de héros sans occulter les contradictions qui font leur singularité. L’ensemble est enlevé et on retrouve, en filigrane, le regard tendre et amusé de de Broca sur les « intellectuels de gauche ». Un film éminemment sympathique.

Sex hygiene (John Ford, 1941)


Film de prévention sur les maladies vénériennes réalisé par John Ford pour les Signal Corps à l’attention des jeunes appelés de l’Armée américaine.

Sex hygiene est une mise en abyme puisqu’il présente des soldats regardant un film sur les dangers des maladies vénériennes. Comme le dit un officier: « Most men know more about their car than they know about their body ». A vrai dire, je n’ai pas regardé grand-chose de cette vingtaine de minutes. Je ne pense pas être une petite nature mais il contient tellement d’images du type « gros plan sur pénis atrophié et purulent » qu’à côté de ce film, Salo, c’est Candy. Il paraît que Sex hygiene a traumatisé une génération de G.Is. Le monteur Gene Fowley Jr, cité par McBride dans sa biographie du maître, se souvenait d’ailleurs: « Ford adorait ce film! Je crois qu’il prenait un plaisir pervers à montrer ces choses choquantes. »

La rayonne (Sette canne, un vestito, Michelangelo Antonioni, 1949)

Court-métrage documentaire sur le processus de fabrication de la soie en Italie.
L’intérêt est d’abord didactique. C’est clair et précis donc le film est réussi par rapport aux intentions qui ont sans doute procédé à son élaboration. Ensuite, certains cadrages des usines montrent de la part du réalisateur un sens plastique qui va au-delà des nécessités de son sujet.

Le passeport jaune (The yellow ticket, Raoul Walsh, 1931)

Russie, 1913. Pour sortir du ghetto et revoir son père enfermé par le tsar, une jeune juive n’a d’autre choix que de se procurer un passeport jaune, celui des prostituées. Au cours de ses pérégrinations, elle va rencontrer le chef de la police secrète tsariste et un journaliste britannique.

C’est au fond très conventionnel mais le récit est imprévisible au possible, bifurquant sans cesse. La profusion de rebondissements, l’absence d’appesantissement des auteurs sur quoi que ce soit et la rapidité de la mise en scène font de ce Yellow ticket un film toujours surprenant et jamais ennuyeux. On ne regarde pas un tel film dans une perspective « auteuriste » mais s’il fallait chercher la trace de la personnalité de Raoul Walsh dans ce divertissement brillamment réalisé, c’est dans le personnage du méchant qu’on la trouverait sans trop d’analyse capillotractée. Le policier joué par Lionel Barrymore annonce les Cody Jarret, Barbe-Noire et autres avatars négatifs du héros walshien qui, au-delà de la morale et de la raison sociale, se livrent complètement à leurs pulsions. C’est un personnage d’un bloc, non soumis à la convention dramatique. Son sincère appétit amoureux ne peut qu’atténuer sa méchanceté aux yeux du spectateur, sans que jamais cela ne remette en question son caractère tyrannique.

Les jeux de l’amour (Philippe de Broca, 1960)

Un jeune couple d’antiquaires ne cesse de se disputer parce que la femme veut un enfant que son amoureux lui refuse. Le meilleur ami du couple pimente l’intrigue.

La simplicité de l’anecdote est, malgré le noir et blanc, agrémentée de la fantaisie du metteur en scène. Je pense par exemple à la séquence euphorisante où les deux tourtereaux se mettent subitement à danser. Il y a là une fraîcheur juvénile qui constitue le meilleur de la Nouvelle Vague. Aussi bien en terme de prétexte narratif qu’en terme de mise en scène (l’importance de la danse), Jean-Luc Godard s’est visiblement beaucoup inspiré des Jeux de l’amour pour Une femme est une femme. La différence, c’est que même lorsqu’il dirige un film plein de la liberté et de l’enthousiasme d’un amateur (ce qu’il est puisque nul doute qu’il aime ce qu’il fait), Philippe de Broca ne se dépare jamais d’une rigueur professionnelle dont Godard s’est toujours foutu.

Jean-Pierre Cassel est épatant, il a l’entrain d’un Belmondo mais ses talents de danseur, la façon qu’il a de mouvoir son corps gracile lui donnent une classe qui est restée unique parmi les acteurs de sa génération. Son personnage pourrait être L’Africain ou L’incorrigible au moment de leur jeunesse. On retrouve d’ailleurs dans Les jeux de l’amour le ressort dramatique, récurrent dans l’œuvre de de Broca, de la confrontation entre le charme de l’immaturité et la nécessité d’un engagement. Comme toujours chez le cinéaste, la fantaisie du style ne le cède jamais à une forme de pudeur qui fait prendre au sérieux les personnages et leurs émotions, aussi typés soient ces personnages. Enfin un mot sur la musique de Georges Delerue, gaie ou triste, déjà en parfaite symbiose avec les images du cinéaste.

La storia (Luigi Comencini, 1986)

Les turpitudes endurées par une mère italienne durant la seconde guerre mondiale.

Ce feuilleton mélodramatique que j’ai vu au cinéma a probablement beaucoup souffert du charcutage préalable à son exploitation en salles. Les personnages n’ont pas beaucoup d’épaisseur, ce qui les motive manque trop souvent de clarté. Ainsi il est étrange de voir une mère apparemment très aimante laisser son gamin de six ans se balader tout seul dans l’Italie de l’immédiat après guerre sans que son comportement ne soit interrogé par le récit ou la mise en scène, comme si cette négligence maternelle allait de soi. Ce genre de béance narrative affaiblit considérablement le drame.

Claudia Cardinale, dans un grand rôle tragique, s’est bêtement enlaidie et a tendance à surjouer la douleur. Cette impression de fausseté vient peut-être encore une fois de la cassure d’une continuité dramatique qui peut-être justifiait le caractère excessif de la prestation de la star. Reste quelques jolis moments, fragments de ce qui fut peut-être une grande oeuvre. Cela fait beaucoup de « peut-être ». En l’état, le film est assez lamentable et ravive le beau souvenir de La ragazza, précédente collaboration entre le cinéaste et l’actrice ayant aussi pour cadre l’immédiat après-guerre. C’était vingt ans auparavant et Claudia Cardinale était alors la plus belle femme du monde.

Pas d’orchidée pour Miss Blandish (The Grissom Gang, Robert Aldrich, 1971)

Durant la Grande dépression, le kidnapping d’une riche héritière par une bande de péquenauds tourne mal.

Pas d’orchidée pour Miss Blandish est un film de gangsters atypique adapté d’un roman noir de James Hardley Chase. C’est une oeuvre aussi belle que son titre français. La vision de l’Amérique de la Grande dépression est particulièrement corrosive, n’épargnant ni le cynisme des riches ni l’immoralité de certains pauvres. Robert Aldrich ne donne jamais l’impression d’excuser le comportement de la famille de malfrats. Seuls comptent les individus, leurs pulsions, leurs actions et surtout leurs névroses. Ce sont ces névroses qui motivent l’outrance d’un style particulièrement violent.

Le récit parfaitement ficelé recèle son lot de retournements de situation qui maintiennent l’attention du spectateur sans jamais apparaître gratuits puisque la psychologie des personnages à l’origine de ces rebondissements est d’une perpétuelle justesse. Aussi caricatural que soit le trait. C’est peut-être dans cet intime paradoxe, que réside le secret de la réussite du film. Sans concession au moralisme facile, les auteurs se permettent d’ailleurs de raconter une belle histoire d’amour dans la dernière partie du film. Cette nécessaire digression d’essence borzagienne achève de faire de Pas d’orchidée pour Miss Blandish un des plus beaux polars des années 70.

Scarlet dawn (William Dieterle, 1932)


Lors de la révolution russe, un officier du tsar fuit avec sa servante. L’amour va naître entre eux.

Voici un artefact de l’époque lointaine dans laquelle le tout-venant des studios hollywoodiens pouvait témoigner d’une capacité sans cesse renouvelée à surprendre le spectateur. Début des années 30. Le cinéma parlant américain s’invente. Le code de censure Hays ne s’est pas imposé, les genres ne sont pas tous différenciés, l’esprit est à nouveau celui des pionniers. Ce qui nous gratifie de charmantes curiosités telles que ce Scarlet dawn. Dans cette fresque historique qui dure moins d’une heure, l’opulence de la direction artistique n’a d’égal que la rapidité de l’enchaînement des péripéties. Les narrateurs atteignent évidemment un remarquable niveau de concision. Certes, personnages et situations n’ont pas beaucoup d’épaisseur mais William Dieterle est un esthète et le soin qu’il apporte à ses images apporte un surcroit d’intérêt à un film dont le schéma dramatique reste, au fond, convenu.

Les belles années (Cuore, Luigi Comencini, 1985)

1915: au moment de partir au front, des anciens camarades de classe se retrouvent.

Comme plusieurs films de Luigi Comencini, Cuore est un mini-feuilleton qui a été raccourci pour une exploitation en salles. C’est de la version télévisée que je vais parler ici. L’œuvre se présente comme une succession de flashbacks déclenchés par les retrouvailles d’un soldat italien avec d’autres appelés qu’il a connus sur les bancs de l’école. Ce sont des saynètes très justes, Comencini sachant mieux qu’aucun autre cinéaste faire ressentir la nostalgie de l’enfance sans sombrer dans la niaiserie. Au final, la guerre fait ressentir cruellement la perte du paradis perdu de l’enfance. C’est cette confrontation qui fait le sel de Cuore. Les films muets montrés à chaque épisode prennent trop de place et leur volonté édifiante est un peu trop signifiée. C’est le seul reproche que je peux faire à ce petit bijou de sensibilité qu’est Cuore.

La femme aux chimères (Young man with a horn, Michael Curtiz, 1950)

La vie d’un trompettiste de jazz.

La femme aux chimères est un « biopic » hollywoodien tout ce qu’il y a de plus conventionnel mais il est mené avec suffisamment de savoir-faire (la plastique « film noir » lui donne un cachet plaisant) et de conviction (Kirk Douglas et Lauren Bacall sont tous deux excellents) pour constituer ce qu’il est coutume d’appeler un bon film.

La boulangère de Monceau (Eric Rohmer, 1963)

Pour aborder une inconnue qu’il croise depuis plusieurs semaines, un étudiant parisien calcule ses déplacements en fonction de ceux de celle qu’il veut conquérir. Lors de ses manoeuvres, il va rencontrer une boulangère qui va le faire dévier de son but.

Le premier des six contes moraux d’Eric Rohmer contient déja tout son auteur. C’est une réflexion clairement exposée sur le déterminisme amoureux et la frivolité du désir. Le style est encore mal dégrossi, trop d’enjeux dramatiques étant présentés essentiellement via le texte (de la voix-off). Il n’y a pas assez de place pour la mise en scène alors que le sujet l’appelait de toute ses forces puisque l’intérêt du film est que les sentiments sont étroitement liés à des notions éminemment concrètes de topographie et de probabilités de rencontre. Heureusement le texte est, cela n’étonnera personne, très beau en lui-même. De plus, la concision du film, son absence de digression, sa rigueur dramatique sont très appréciables. Là où un Desplechin se serait éternisé pendant deux heures, Rohmer expédie l’affaire en 30 minutes.

Furie (Brian De Palma, 1978)

Un agent des services secrets américains tente de sauver son fils doté de pouvoirs télékinésiques des griffes de ses employeurs.

L’histoire est donc ahurissante. De toute façon, Brian De Palma ne se donne pas la peine de nous y faire croire. Son scénario n’est que pur prétexte à étalage de virtuosité en pilotage automatique. Entre les morceaux de bravoure attendus, le spectateur doit se fader plusieurs scènes ennuyeuses sur la télékinésie. Le problème avec DePalma, c’est que c’est un metteur en scène au talent limité. Il est bon pour distordre Hitchcock dans tous les sens mais il n’est pas fichu de faire exister des personnages dans leur quotidien. Par exemple, il ne sait pas filmer un petit déjeuner entre deux femmes. Il se sent obliger de faire bouger sa caméra de droite à gauche. Sans le moindre objet. Aucune des deux femmes n’existe alors mais le réalisateur s’en fout, il fait mumuse avec son appareil. Les deux actrices sont d’ailleurs affreusement mal dirigées.

Heureusement, il y a Kirk Douglas, acteur d’une autre trempe que John Travolta ou Michael Caine, qui donne une consistance charnelle et émotionnelle à son personnage archétypal. La séquence où il se met soudainement à pleurer après que la fille ait évoqué sa défunte maîtresse détonne avec le reste du film. D’une manière générale, Furie est sauvé de la médiocrité totale par les deux ou trois séquences particulièrement inspirées où la perte d’un être cher est évoquée. Deux ou trois séquences qui se suffisent presque à elle-même et qui révèlent l’inclination mélancolique de De Palma, celle qui sera la substance de son chef d’oeuvre: Mission to Mars.