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Après 17 mois de chômage, un journaliste est « demandé » en tant que jouet par le fils de son richissime patron…
Le premier film réalisé par Francis Veber est aussi son plus incisif. Rarement la comédie française avait représenté la lutte des classes et attaqué le pouvoir de l’argent aussi franchement. Marcel Dassault est clairement satirisé. La particularité du Jouet est d’inscrire ce discours social dans le monde de l’enfance. Un enfant gâté et délaissé s’entiche, d’abord par caprice puis par amour filial, d’un adulte en qui il a reconnu un semblable; d’où une dialectique de l’enfance et de la responsabilité qui correspond avec une dialectique de l’humiliation et de la dignité retrouvée. Même si son argument de base peut paraître artificiel, la mécanique narrative concoctée par Francis Veber est exceptionnelle de par sa richesse et la précision de ses emboîtements.
Sans pour autant se déballonner politiquement, l’auteur évite le militantisme manichéen à l’image de la séquence de la garden-party où « le jouet » ne rejoint pas les syndicalistes qui manifestent derrière la grille mais retourne le rôle humiliant que les riches lui font jouer et met le bazar chez son patron, à sa façon régressive et poétique. De même que Michel Bouquet dans le rôle de l’industriel, Pierre Richard est évidemment parfait dans le rôle du jouet. Son talent burlesque est joliment exploité par le metteur en scène débutant. Si, par la suite, Francis Veber a fait plus drôle, il a rarement fait plus équilibré que cette fable où la tendresse est érigée en rempart ultime contre le pouvoir de l’argent.