Les 1001 nuits (Philippe de Broca, 1990)

A Bagdad, une jeune fille condamnée à mort par le sultan invoque un savant qui fut téléporté dans le Londres contemporain pour la sortir des périlleuses situations où elle est entraînée.

Une sympathique fantaisie qui ne se prend pas au sérieux mais dont le rythme et le dynamisme sont, surtout dans la première partie, entraînants. Au bout d’un moment, les péripéties se font répétitives et la ringardise des effets spéciaux lasse…Mais peu importe car, en 1990, Philippe de Broca avait toujours très bon goût en matière de femmes. Catherine Zeta-Jones, 19 ans, est à peu près sublime. Merci à lui de l’avoir lancée au cinéma.

Drôle de meurtre (Remains to be seen, Don Weis, 1953)

Dans un immeuble new-yorkais, le gérant découvre qu’un homme est mort tandis que la nièce de ce dernier arrive…

Les ressorts de cette comédie policière sont théâtraux mais la variété de l’histoire et la sympathie des acteurs font passer un bon moment.

 

Mercuriales (Virgil Vernier, 2014)

Les destins de deux jeunes filles et d’un jeune homme qui sont agents d’accueil et vigile aux tours Mercuriales, porte de Bagnolet.

L’intention de faire un film sur la survivance des modes de pensée archaïques dans la société contemporaine est évidente mais aucun liant ne vient donner corps à ces notations éparses entrelardées d’images de décors urbains aussi imposantes que vaines. Virgil Vernier a un talent plastique mais globalement, Mercuriales sonne prétentieux et confus.

Le col du grand Bouddha (Hiroshi Inagaki, 1935)

Un samouraï possédé par le mal croise des proches de gens qu’il a assassinés…

Première partie d’une adaptation d’un roman-fleuve. Passant d’un point de vue à un autre sans logique évidente, la narration manque d’unité dramatique mais les samouraïs dans la montagne, la forêt et la neige sont joliment filmés. Il y  a même une ou deux évocations élégiaques.

Les déchaînés (A private’s affair, Raoul Walsh, 1959)

Pendant leur entraînement, trois appelés aimant chanter sont repérés par un producteur de spectacle télévisé mais l’un d’entre eux perd sa voix et, abusant des médicaments pour la retrouver, s’endort et, à cause d’un échange de lits à l’infirmerie, est marié dans son sommeil à l’assistante du secrétaire d’état à la Défense.

C’est tout le génie de Raoul Walsh que de conférer à un échaufaudage narratif qui paraît aussi alambiqué sur le papier un naturel souverain grâce à sa maîtrise tranquille de la mise en scène: ampleur du Cinémascope qui évite de fragmenter les séquences, fluidité du ton, incarnation du récit à travers l’action, aisance des transitions, équilibre dans la caricature, invention des gestes qui insuffle une vérité nouvelle à une séquence aussi conventionnelle que celle où les recrues retrouvent leurs dulcinées à la plage. Pour brocarder l’absurdité de l’ordre militaire, le comique de répétition -ou plutôt de variation- est poussé dans ses ultimes retranchements.

Derrière la pochade courtelinesque,  le vieux maître porte un regard détaché sur la modernité sous ses différents aspects: assouplissement des règles de la caserne, femmes accédant aux postes à responsabilité, télévision, beatniks…mais l’administration est toujours aussi stupide et la soldatesque toujours en quête de femmes: « pour que rien ne change, il faut que tout change », Walsh aurait pu réaliser Le guépard. Ainsi, Les déchaînés n’est pas un film aussi mineur que son sujet et sa distribution, constituée par les jeunes premiers de la Fox, ne le laissent paraître.

Anne-Marie (Raymond Bernard, 1936)

Un groupe d’aviateurs accueille une jeune femme en son sein…

Le scénario a beau être signé Saint-Exupéry, il est laborieux car essentiellement basé sur les dialogues; dialogues qui servent aussi bien à faire avancer l’action qu’à dévoiler les états d’âme des personnages. La séquence de péril final apparaît alors conventionnelle et décorative, exception faite d’une belle idée. Les travellings élégants et une photo soignée font illusion pendant la première partie du film mais au fur et à mesure que le récit avance, le drame de cette femme tiraillée entre un amoureux ingénieur et des amis aviateurs s’avère trop désincarné pour que l’on s’en émeuve. Brodant à nouveau sur le thème d’une femme dans un groupe d’hommes, Raymond Bernard convaincra nettement plus avec J’étais une aventurière car Jacques Companeez était un scénariste d’une autre trempe que l’auteur du Petit prince.

Le jeune homme capricieux (Mansaku Itami, 1935)

Deux samouraï tentent de s’infiltrer chez un ennemi de leur maître…

Le jeune homme capricieux confirme à mes yeux le talent et la singularité de l’auteur de L’espion Kakita Akanishi. Le ton picaresque et comique, que des inventions de montage poussent jusqu’à la pure fantaisie,  brocarde allègrement les valeurs du bushido mais n’empêche pas les combats d’être filmés avec vivacité et la beauté des décors naturels d’être restituée. L’élégance de Mansaku Itami se traduit également par une célébration de l’intelligence qui préfigure les héros de John McTiernan.

Cupidon photographique (I love Melvin, Don Weis, 1953)

A New-York, un photographe un peu raté travaillant à Look tombe amoureux de la fille d’un épicier qui rêve de devenir vedette.

Dans la lignée de Chantons sous la pluie (on retrouve Donald O’Connor et Debbie Reynolds qui y forment un couple fort sympathique), I love Melvin est une petite comédie musicale dynamique, fraîche et enjouée où Don Weis pose un regard tendre et amusé sur les rêves et ambitions de ses divers personnages.

La fille de l’usine de briques (Yasuki Chiba, 1940)

Dans un quartier populaire, une jeune fille dont la famille dysfonctionne sympathise avec une camarade coréenne récemment immigrée.

Les bons sentiments sont sympathiques, certaines images sont joliment composées mais c’est très décousu et ça manque de relief et d’un point de vue affirmé sur le sujet (même si le seul choix du sujet étonne compte tenu de l’époque). C’est le genre de film ras-les-pâquerettes qui a besoin d’un Naruse ou d’un Ozu inspiré pour être transfiguré.

Le petit café (Raymond Bernard, 1919)

Un garçon de café hérite d’un marquis mais est forcé de garder son emploi par une clause de dédit.

La perfection astucieuse de l’intrigue d’après Tristan Bernard, la richesse burlesque et humaine de l’élégante interprétation de Max Linder et la qualité du découpage font de ce premier long-métrage français de comédie un pari réussi.

Nuits de Chine (Osamu Fushimizu, 1940)

A Shanghaï, une Chinoise qui hait les Japonais depuis la mort violente de ses parents s’éprend d’un policier nippon…
Les éclairages et cadrages sont d’un bon niveau mais la propagande est risible, le rythme mou, les ficelles énormes, le récit hétéroclite, le drame très mal construit et l’oeuvre dépourvue d’unité. Toutefois, une séquence de déambulation dans les ruines s’abstrait presque du contexte mélodramatico-propagandiste pour atteindre à une douleur universelle qui préfigure Allemagne année zéro. Nuits de Chine n’en demeure pas moins un très mauvais film.

Ce soir ou jamais (Michel Deville, 1961)

Dans un appartement parisien, un jeune dramaturge et de non moins jeunes comédiens attendent la vedette de la pièce et font passer des auditions.

Les actrices sont joliment filmées mais la faiblesse du prétexte, la nullité des développements et l’antipathie des personnages rendent démesurée la longueur de l’oeuvre. Vain.

Mon épouse et la voisine (Heinosuke Gosho, 1931)

Un dramaturge est soi-disant empêché d’écrire par le bruit que font sa femme, ses enfants et sa voisine chanteuse de jazz.

Ce premier film parlant japonais est une comédie domestique qui contient quelques gags amusants et inventifs (dans leur exploitation du son notamment) mais qui pèche par lenteur et par absence quasi-totale de récit.

Okoto et Sasuke (Yasujiro Shimazu, 1935)

Son jeune assistant tombe amoureux d’une professeur de shamisen aveugle.

La construction de ce mélodrame est assez bizarre dans la mesure où le drame, puissant, ne se noue qu’après pas mal de digressions qui montrent la professeur de musique, interprétée par l’excellente Kinuyo Tanaka, dans son école de musique et avec ses parents. Un aspect qui étonne, compte tenu de l’époque de l’oeuvre, est que l’héroïne tombe enceinte sans que personne ne sache le nom du père (pas même le spectateur) et que la narration ne s’en préoccupe guère. On acte que l’on va confier le bébé parce que la mère veut rester indépendante et on passe à autre chose. L’unité peine à se faire sentir dans cette oeuvre globalement terne mais les acteurs sont justes et le découpage soigné met en valeur la joliesse nippone (cerisiers en fleurs, façades de demeures traditionnelles…). Bref, c’est pas mal mais je n’en ferais pas un classique du cinéma japonais de l’époque.

Un homme traqué (A man alone, Ray Milland, 1955)

Dans une petite ville de l’Ouest, un étranger est pourchassé par des notables l’accusant de leur crime.

Le récit comporte des facilités et des cheveux sur la soupe mais l’exploitation visuelle, dramatique et poétique du vent, de la poussière, de la soif et de la faim insuffle un ton singulier à ce petit western. Les quinze premières minutes presque complètement muettes sont à la fois audacieuses et pertinentes (avec qui parlerait un homme seul dans le désert?).

Let’s go native (Leo McCarey, 1930)

Une modiste endettée et son amoureux fils de bonne fuient vers l’Amérique du Sud mais échouent sur une île du Pacifique sud.

Une ineptie digne des nanars français des années 30. Le scénario est nul mais, de plus, la facture est piteuse quoique le film soit produit par Paramount. Il n’y a rien à sauver, pas même les chorégraphies signées Busby Berkeley.

Chants de tourtereaux (Masahiro Makino, 1939)

La fille d’un marchand de parapluies est amoureuse d’un samouraï courtisé par deux autres femmes…

Bien qu’il fut tourné en 15 jours, ce classique de la comédie musicale japonaise étonne par sa haute tenue formelle. Les images sont joliment composées, la caméra est mobile, le rythme est enlevé et il y a même un beau passage nocturne et fantastique qui paraît tout droit sorti de chez Mizoguchi. Les nombreuses chansons amènent de la variété et de la gaieté. Cette gaieté n’exclut pas quelques moments touchants; le caractère mélodramatique du sujet n’étant pas tout à fait escamoté par la mise en scène. Bref, Chants de tourtereaux allie la fantaisie d’un Jean Boyer à la maîtrise technique d’un George Stevens.