L’honorable M.Wong (The hatchet man, William Wellman, 1931)

A San Francisco, un immigré chinois tueur pour les triades est forcé de tuer son meilleur ami qui lui a promis la main de sa fille…

Exotisme à deux balles et scénario à la fois prévisible et rocambolesque. Un éclat: la fin, où Wellman invente un enchaînement de plans d’une violence terrifiante.

Le chat botté (John W.Brunius, 1918)

Un héritier désargenté utilise les services de son meilleur ami pour contracter un riche mariage.

Nullement drôle, cette pseudo-comédie légère, dénuée de la beauté naturelle emblématique de l’école suédoise, ne peut être regardé aujourd’hui sans un grand effort de concentration tant sa mise en scène est « plan-plan ». Aucun intérêt.

Mr and Mrs Bridge (James Ivory, 1990)

Dans les années 30 et 40, la vie d’une famille bourgeoise de Kansas City.

Une belle délicatesse de touche, au niveau du montage notamment, empêche cette vision rétrospective de l’Amérique conservatrice de verser dans la caricature mais il y a quelque chose d’amidonné dans la reconstitution qui verse parfois dans l’esthétisme. Avec leur élocution forcée, Paul Newman et Joanne Woodward incarnent moins des personnages saisis dans leur élan vital que des abstractions qui peuvent toutefois s’avérer attachantes (le père rigide-mais-aimant, la mère corsetée-mais-névrosée). Bref, on passe un assez bon moment devant cette chronique familiale menée avec une certaine justesse de ton mais on ne peut se défendre, à la fin de la projection, d’un petit sentiment d’à-quoi-bonisme. Les films de Henry King contemporains de l’action avaient le mérite d’être plus touchants et percutants, avec leur simplicité directe.

Le voyage à Lyon (Claudia Von Alemann, 1981)

Une jeune Allemande part à Lyon sur les traces de Flora Tristan, militante féministe et socialiste du XIXème siècle.

Aucun intérêt dramatique, narratif, plastique, poétique ni même documentaire car on a beau voir beaucoup Lyon, ses rues en sont bizarrement presque toujours désertes. A côté de Claudia Von Alemann, Chantal Akerman, c’est Steven Spielberg.

L’un des nôtres (Let him go, Thomas Bezucha, 2020)

Après le décès accidentel de leur fils, un policier à la retraite et son épouse quittent leur ranch pour arracher leur petit-fils des griffes de sa nouvelle belle-famille.

Il y a un peu deux films en un. D’abord, l’histoire d’un beau couple vieillissant formé par Kevin Costner et Diane Lane, avec ses souvenirs amers et sa tendre tolérance pour les petits vices de l’autre, racontée dans des paysages grandioses et magnifiquement filmés avec un rythme apaisé mais qui ne dédaigne ni l’ellipse ni la suggestion. Toutes qualités classiques qui font de Thomas Bezucha un digne héritier de Clint Eastwood. En revanche, ce qui a trait à l’opposition westernienne contre la deuxième famille peine à convaincre car ces méchants manquent de motivation crédible et le cabotinage de Lesley Manville fait tomber leurs scènes dans le grand-guignol.

Phffft! (Mark Robson, 1954)

Après huit ans de mariage, un avocat et une journaliste divorcent…

Comédie de remariage qui, pour être tardive et dénuée d’ambition sociologique (propre aux meilleurs des films que Cukor tournait alors pour le même studio, la Columbia), n’en demeure pas moins réussie. Jack Lemmon et Judy Holliday forment un couple aussi amusant qu’attachant. Le canevas est très classique -pour ne pas dire convenu- mais le film sait surprendre grâce à quelques détails justes à l’intérieur des scènes et à un rythme impeccable dans la transmission des informations au spectateur qui lui évite de s’ennuyer. Le découpage de Mark Robson m’a semblé supérieur à celui de George Cukor, plus concis et plus fluide. Bref, c’est tout à fait plaisant.

… à la campagne (Manuel Poirier, 1995)

Dans un village de l’Eure, un célibataire tombe amoureux d’une jeune femme sortie de prison.

S’il y a bien une catégorie de films pour lesquels l’image de chiantitude qui colle au cinéma français s’avère exacte, c’est cette tendance du jeune cinéma d’auteur des années 90 où l’on retrouve notamment des films de Cédric Kahn, Catherine Breillat, Sandrine Veysset, Bruno Dumont et, donc, Manuel Poirier. Avec son intrigue étique, ses dialogues aussi indigents que ceux d’une parodie des Inconnus, ses personnages sans consistance, sa vision de la province platement désespérante et son découpage hyper sommaire, … à la campagne est une caricature de film non pas naturaliste (le contexte social est par trop inexistant) mais morne et creux.

Et l’acier fut trempé (Marc Donskoï, 1942)

En Ukraine en 1918, des partisans bolcheviks combattent le pouvoir allié aux Allemands.

Année de production oblige, l’adaptation du livre du révolutionnaire Ostrovski est orientée dans un sens anti-allemand. Le film apprend l’existence d’un épisode méconnu de l’histoire de l’Ukraine (l’hetmanat de 1918) et est brillamment spectaculaire sans être, dans l’ensemble, abusivement formaliste. Ce n’est bien sûr pas d’une grande finesse mais, grâce notamment au sens de la beauté naturelle de Donskoï et à l’amour de la vie qui nuance et dialectise la nécessité de l’engagement armé, les personnages ne semblent pas complètement soumis au schéma propagandiste.

Prisonnier de la peur (Fear strikes out, Robert Mulligan, 1957)

Un jeune espoir du base-ball est rendu fou par la pression que lui met son père.

Après une excellente première partie, la pesanteur didactique (via le récit et les dialogues) et expressive (via l’interprétation parfois exagérée de Anthony Perkins) se fait sentir mais le tout demeure habilement mené, avec une efficacité, une précision et un sens de l’ambiguïté d’autant plus dignes d’admiration qu’il s’agissait du premier film de Mulligan (tourné pour le cinéma).

Or, argent, mort (Peque Gallaga, 1982)

Pendant la seconde guerre mondiale, une riche famille philippine fuit sa demeure et s’installe dans la jungle…

Cette fresque de plus de trois heures est frustrante car celle manque aussi bien de mise en exergue des enjeux dramatiques que de développement des personnages. La mise en scène ne dévie de l’académisme kitsch (cette musique…) que pour verser dans le film d’exploitation le plus répugnant: il est facile, mais aussi parfaitement indécent et malhonnête, d’exprimer l’horreur de la guerre en filmant en gros plan le crâne d’une jeune fille se faire exploser à bout portant.

Le mariage de Joujou (Ivan Hedqvist, 1919)

Pour ne pas être déshérité, un jeune homme de bonne famille qui s’est fiancé à une boulangère charge sa dulcinée d’amadouer son oncle pendant un séjour dans sa famille.

Un marivaudage d’une belle finesse, tant au niveau de la lumière que du scénario et de la direction d’acteurs. Les jeux de séduction s’incarnent dans une splendeur solaire qui tranche d’avec la gravité puritaine propre à d’autres cinéastes suédois. Une plaisante réussite qui donne envie de creuser la filmographie de Ivan Hedqvist.

The Virginian: It tolls for thee (Samuel Fuller, 1962)

Le Virginien tente de délivrer son patron enlevé par un bandit.

Difficile de retrouver la patte de Samuel Fuller dans ce western télévisuel pas même correctement construit: avec les deuxième gang qui veut se venger, Fuller a ajouté une intrigue secondaire qui parasite inutilement l’intrigue principale. Quelques dialogues sur-signifiants et artificiels sur la violence entre le gentil et le méchant, joué par Lee Marvin, semblent ce que la commande contient de plus personnel. Reste le charme du genre dans sa simplicité élémentaire.

Le désir de chaque femme (A lady to love, Victor Sjöström, 1930)

A cause d’un malentendu, la fiancée d’un immigré italien de la Napa Valley est troublée par son ami, plus jeune.

Le statisme de la mise en scène et la trop visible omniprésence du studio, directement corrélées à l’arrivée du parlant, ainsi que le cabotinage « ethnique » de Edward G.Robinson, aussi mauvais que Paul Muni, écrasent de fausseté cette plate adaptation d’un succès théâtral, déjà pas très intéressante à la base.

Le vaisseau tragique (Victor Sjöström, 1923)

L’ancien amoureux de l’épouse d’un capitaine embarque à bord du navire de ce dernier en tant que second.

Dernier film de Victor Sjöström tourné en Suède, Le vaisseau tragique porte bien son nom: la dignité du ton et les changements de point de vue insufflent une hauteur de vue qui empêche le manichéisme de s’installer. La dramatisation résulte d’un inéluctable enchaînement de faits (généralement) circonstanciés, comme dans les bons films américains. La mise en scène de Sjöström est toujours un sommmet de plénitude: dramatiquement subtile, émotionnellement touchante, visuellement spectaculaire et discrètement poétique. En tant qu’acteur, il est encore une fois remarquable, rendant sensible toutes les nuances d’un personnage ambivalent. Matheson Lang, vedette canadienne embauchée pour faciliter l’export, est moins expressif. La résolution heureuse pourrait paraître artificielle mais se trouve suffisamment étayée et affinée pour être acceptée par le spectateur sourcilleux.

L’épreuve du feu (Victor Sjöström, 1922)

A Florence pendant la Renaissance, une épouse adultère dont le mari est mort d’un malaise est accusée d’avoir tué ce dernier.

Un symbolisme un peu laborieux, surtout dans la dernière partie où le montage parallèle entre le supplice et la crise de remords paraît forcé, et des acteurs parfois excessifs n’empêchent pas L’épreuve du feu d’être une nouvelle réussite de Sjöström, riche d’images admirablement composées et où la lumière fait ressentir le poids de la matière. L’utilisation des flambeaux amplifie l’intensité dramatique des scènes de foule même si celles-ci ne sont pas hyper-riches en figurants. Sans tricher, la mise en scène restitue toute l’ambiguïté des faits, ce qui nuance le manichéisme moral.

Maître Samuel (Victor Sjöström, 1920)

Un prêteur sur gages acariâtre et méprisé par sa communauté s’entiche d’une jeune fille fiancée à un marin joueur…

Ce n’est pas sur le ton de la comédie que Victor Sjöström a traité ce sujet cher à Molière et à Dino Risi mais avec un mélange de tendresse retenue et de discrète cruauté. Sa mise en scène sophistiquée – avec notamment une belle utilisation de la profondeur de champ et des surcadrages- restitue les nuances psychologiques aussi bien qu’elle brosse le tableau de moeurs de la ville portuaire où se déroule l’action. Avec Maître Samuel, l’auteur des Proscrits et de Terje Vigen réalise encore une fois un très bon film, admirable de justesse et de maîtrise.

Le testament de Sa Grâce (Victor Sjöström, 1919)

Un vieux seigneur conditionne l’héritage de sa descendante à son mariage…

Comédie sans intérêt, prétexte au numéro d’une vedette du théâtre royal du Danemark: Karl Mantzius qui n’a pas fait carrière au cinéma et ça se comprend. Sjöström est moins doué que Stiller pour les comédies: il n’a pas sa légèreté versatile.

Les vautours de la mer (Victor Sjöström, 1915)

Une famille de contrebandiers a affaire au fils d’un douanier qu’ils ont dû tuer quinze auparavant et dont leur fille est amoureuse.

De belles images maritimes et une séquence d’action impeccable (le sabordage) surnagent au sein d’un film au découpage encore primitif tandis que le tragique de l’intrigue est gauchi par les coïncidences rocambolesques.