Gwendolina (Alberto Lattuada, 1957)

Une jeune fille de la bourgeoisie dont les parents sont sur le point de se séparer vit ses premières amours.

Ecrit par Valerio Zurlini, Gwendolina montre l’importance de la mise en scène puisque si le thème -éveil amoureux d’une adolescente- est proche des premiers films de l’auteur de Été violent, le tout est d’une banalité qui l’apparente plutôt aux téléphones blancs, malgré l’absence de la fraîche candeur qui fait le charme des meilleurs films de ce courant ainsi que la présence de quelques très vagues notations sociologiques qui montrent que, en 1957, le cinéma italien n’était plus sous une cloche aussi hermétique qu’à l’époque de Signorinette.

La Fille des boucaniers (Frederick De Cordova, 1950)

L’ayant retrouvé à la Nouvelle-Orléans, une jeune femme devient la maîtresse du pirate qui l’avait capturée…

L’intrigue est proche de l’ineptie mais le superbe Technicolor de Russell Metty, le rythme vif et une séquence d’abordage mouvementée fournissent un sympathique écrin à la splendide Yvonne de Carlo.

Le chant de la brume (Hiroshi Shimizu, 1956)

Retournant dans un chalet des Alpes japonaises avec sa fille et son gendre, un botaniste se souvient y avoir été dix ans auparavant avec sa secrétaire, alors qu’il était en froid avec son épouse…

La théâtralité de la construction est transfigurée par la justesse de l’interprétation, la délicatesse du ton et l’inscription du drame dans un décor cosmique. Plusieurs séquences dénotent le génie intact du metteur en scène, insufflant un puissant lyrisme mélancolique par le seul truchement de ses acteurs et des distances entre ces derniers, les décors et la caméra. Shimizu est certes aidé par la musique, qui rappelle le troisième mouvement du quatuor n°15 de Beethoven, et par le beau « gris et blanc » de la photographie. Le bouleversant et grandissime travelling final est de ces plans qui appellent tous les superlatifs à l’échelle de l’histoire du cinéma.

La duchesse des bas-fonds (Kitty, Mitchell Leisen, 1945)

A Londres à la fin du XVIIIème siècle, un jeune aristocrate éduque une fille des bas-fonds pour qu’elle séduise le duc qui lui a fait perdre sa place.

Sorte de mixte entre Ambre et Pygmalion. C’est dramatisé avec une certaine finesse, les acteurs sont bons, la reconstitution fastueuse, le récit assez prenant et la fin très belle. Néanmoins, KItty manque d’un point de vue fort de mise en scène et de continuité dans le focus sur l’héroïne pour être un vrai grand « women drama » (par exemple, au moment de l’accouchement, un cinéaste rigoureux -et non décoratif- n’aurait pas accordé autant de temps aux allées-et-venues pseudo-comiques du mari).

Les enfants qui ont besoin d’une mère (Hiroshi Shimizu, 1956)

Une mère dont le fils a disparu se met à travailler dans un orphelinat…

L’intrigue mélodramatique n’est guère convaincante, surtout dans sa désolante dernière partie, mais celle-ci a en fait peu d’importance. Hiroshi Shimizu s’attache à une succession de moments qui montrent ce qui lui tient à coeur: le travail éducatif, la détresse affective des orphelins et, surtout, le lien d’implication entre tragédie intime et dévouement à autrui. Si on fait abstraction des excès sentimentaux de la musique, il le fait avec la grâce propre à ses plus beaux films: délicatesse des travellings, inscription du drame dans des paysages accueillants, finesse du jeu des comédiens, humour jamais tout à fait absent. Certains moments, tel les adieux avortés du fils à son père, sont parmi ce que Shimizu a filmé de plus émouvant.

Comme un oiseau sur la branche (John Badham, 1990)

Dans une station-service, une avocate retrouve son amant de jeunesse qu’elle croyait décédé dans un accident mais qui avait en fait changé d’identité dans le cadre du programme fédéral de protection des témoins.

C’est le début d’une série de courses-poursuites avec des tueurs de la Mafia. Les prétextes narratifs sont légers et invraisemblables mais peu importe tant le rythme est enlevé, les scènes d’action allègrement menées (le dénouement dans le zoo est digne de John McTiernan) et le couple Mel Gibson/Goldie Hawn sympathique. Dernier point capital car Comme un oiseau sur la branche est autant un film d’action qu’une comédie de remariage. A noter que Goldie Hawn avait dix ans de plus que son partenaire mais que ça ne se voit pas du tout tant elle avait gardé un corps sublime.

Le Narcisse jaune intrigue Scotland Yard (Ákos Ráthonyi, 1961)

Un policier hong-kongais aide Scotland Yard à enquêter sur des meurtres de prostituées.

Une habileté de faiseur, un certain sens de la narration visuelle, se trouve employé au service d’une intrigue qui paraît vaine tant elle est gratuitement emberlificotée et tant les personnages sont inexistants.

Une maîtresse dans les bras, une femme sur le dos (A Touch of Class, Melvin Frank, 1973)

A Londres, un Américain père de famille séduit une mère divorcée. Les deux ne recherchent que la bagatelle et s’entendent rapidement pour partir en week-end à Malaga.

Resucée anglaise de la comédie américaine des années 30-40, à la limite de l’exercice de style. C’est fait avec un certain talent (brillamment dialogué et bien interprété, surtout par George Segal), souvent drôle mais les ficelles pour relancer l’action deviennent trop visibles après l’arrivée à Malaga. La mise en retrait des personnages de l’épouse et des enfants nuit également à l’équilibre dramatique.

La foire aux chimères (Pierre Chenal, 1946)

Par amour pour la partenaire aveugle d’un lanceur de couteaux, un graveur de billets excellent et défiguré se met à faire de la fausse monnaie…

Cet avatar tardif du réalisme poétique a le mérité d’être plus incarné que ses prédécesseurs: le drame a pour origines la chair meurtrie du personnage d’Erich Von Stroheim et les yeux inopérants de son amoureuse. Même s’il est fondamentalement conventionnel, le récit est -à l’exception du consternant dénouement- agencé avec suffisamment de précision pour que le spectateur y croit: à part quelques lignes de dialogues de Madeleine Sologne, le film est dépourvu du côté éthéré et fumeux des histoires d’amour de Prévert. J’ai beaucoup songé à Tod Browning, un petit peu à Chaplin (les auteurs de La foire aux chimères se sont certainement souvenus des Lumières de la ville). Pierre Chenal prouve encore une fois son talent de metteur en scène avec notamment un excellent sens du décor et de l’atmosphère, toujours au service de l’action, que ce soit à la fête foraine ou dans la somptueuse demeure destinée à accueillir la dulcinée. Si le film est une (petite) réussite, c’est en grande partie grâce à lui.