Dans la Tchécoslovaquie occupée par les nazis, un homme est chargé par les autorités collaboratrices de « gérer » le magasin d’une vieille juive.
Le miroir aux alouettes est un beau film car il replace l’occupation nazie dans toute la complexité de sa dimension humaine et sociale. Il montre avec un saisissant réalisme la médiocrité faite d’arrivisme, d’opportunisme, de passivité et de petites combines qui a permis aux politiques anti-juives des Allemands de prospérer. Il montre aussi les éventuels sursauts moraux des protagonistes ainsi que la terrifiante « anormalité » de ces prises de conscience dans un contexte où chacun ne pense qu’à tirer son épingle du jeu. Voir ainsi les scènes terribles où le « gérant aryen » désigné par les autorités en vient à battre sa femme parce qu’elle le harcèle pour qu’il s’accapare le supposé magot de la vieille dame.
Si l’inconscience de la vieille dame de ce qui se trame autour d’elle paraît quelque peu exagérée pour les besoins de la fiction, le cheminement du personnage principal est, lui, tout à fait passionnant. Sa prise de conscience n’en fait pas un héros mais, dans un monde désolé, le conduit à sa perte. Tel Dimitri Karamazov, il ne lui restera plus qu’à s’enivrer pour oublier l’horreur. Si certains effets de la caméra paraissent un peu appuyés (les tremblements subjectifs pour exprimer le vacillement des personnages), sa fluidité sert dans l’ensemble admirablement le récit.