Annette (Leos Carax, 2021)

Un comique épouse une soprano mais le bonheur du couple est altéré par la violence latente de l’homme.

Beaucoup de « self-indulgence » comme disent les Américains (les trop longues scènes de comédie), une musique omniprésente qui n’a pas vraiment le niveau de celle des Parapluies de Cherbourg et des effets de manche distanciateurs dont l’oeuvre aurait très bien pu se passer mais Annette n’est pas qu’un film de petit malin branchouille. L’ambition de Leos Carax, qui signe ici ce qui est selon moi son film le plus audacieux et le plus abouti, force le respect. Au-delà de la somptuosité plastique (même si son acteur principal a une face simiesque ) et de l’inventivité poétique de plusieurs séquences, sa tentative de ne travailler que sur du mythe pur, sans le moindre ancrage réaliste, emporte le morceau dans une brillante séquence finale où, enfin, l’émotion point. Après plus de deux heures de projection, c’est un peu tard mais c’est notable.

Pierre ou les ambiguïtés (Leos Carax, 2001)

Un jeune homme très riche fuit sa famille lorsqu’il rencontre une vagabonde qui affirme être sa demi-soeur…

Lisant le roman de Herman Melville, déséquilibré et incohérent mais gonflé par le lyrisme, la philosophie et l’ironie, je me disais qu’en effet, Leos Carax, pourrait en être un pertinent adaptateur. Las! Ne reste dans ce téléfilm en trois épisodes que la faiblesse de la construction dramatique, rendue encore plus nulle par le changement de contexte spatio-temporel qui obscurcit la relation entre Pierre et la mémoire de son père ou la relation entre Pierre et son cousin. Le sérieux perpétuel qui bascule régulièrement dans le ridicule faute de soubassement narratif, la laideur de la photographie -grisâtre ou obscure- et le jeu limité de Guillaume Depardieu et Katerina Golubeva -systématiquement échevelés pendant trois heures- échouent à donner la moindre consistance aux diverses situations charriées par un récit incohérent. Parfaitement gratuits, des inserts oniriques et une scène porno viennent certifier l’oeuvre d’une griffe « auteur »…Les indulgents pourront sauver de ce naufrage deux ou trois mouvements de caméra qui en jettent et un relatif sens du décor dans les scènes à l’usine désaffectée et dans la forêt.