Dans un immeuble philippin, un étudiant épie une femme et son époux…
Ce brillant thriller érotique philippin a d’abord le mérite de restituer l’effet du décor sur la psyché des personnages; pure affaire de mise en scène. La promiscuité engendre des désirs capiteux. Par ailleurs, c’est parce que son mari est veilleur de nuit que la femme se fait baiser tous les soirs par un jeunot. L’amour et le social sont étroitement mêlés, l’un ne supplante pas l’autre et la hauteur tragique est préférée à toute simplification manichéenne: pour être brutal, le mari n’en est pas moins vulnérable et aimant. Aux trois quarts du film, il y a ainsi une étonnante trouée émotionnelle que n’aurait pas reniée Nicholas Ray.
Comme dans Le crime de M.Lange, le microcosme des habitants de l’immeuble est saisi dans toute sa verdeur réaliste et ses particularités poétiques: un opiumane chante du folk américain, un voyeur est froidement revolvérisé après s’être fait attrapé par les voisins, une jeune fille se fait enculer dans la douche partagée.
Enfin, tout thriller voyeuriste implique une variation dramatisée des points de vue, autrement dit un découpage plus sophistiqué que ce que je connaissais jusqu’à présent du cinéma philippin. En la matière aussi, Scorpio nights s’avère tout à fait convaincant: la franche représentation du sexe, à l’opposée de la pudibonderie hollywoodienne, n’exclut ni le jeu ni l’esthétisme; les séquences érotiques sont splendides même si l’actrice n’est pas à proprement parler un prix de Diane.