Red rocket (Sean Baker, 2021)

Un acteur de porno revient chez sa femme dans sa ville natale, au Texas.

C’est drôle: les préjugés sociaux et la bête vanité du mâle sont croqués un peu de la même façon que chez Dino Risi.

C’est fin: à part au dernier acte où les motivations de certains personnages sont floues, l’écriture et l’interprétation sont d’une grande justesse; en filigrane, Red rocket montre avec acuité mais sans misérabilisme les pauvres blancs (ou moins blancs) de l’Amérique profonde. Notamment, Sean Baker évoque clairement une femme qui fut forcée d’accepter que sa fille se prostitue pour payer le loyer sans faire du Dardenne, sans plomber une oeuvre qui garde sa tonalité légère et colorée: bravo à lui.

C’est élégant: beauté du Cinémascope dans lequel sont visuellement structurés les rapports entre les personnages et qui ancre ceux-ci dans la petite ville, suggérée à partir d’une poignée de points récurrents (l’usine, le fast-food, la piste cyclable…).

Mais c’est finalement malaisant, sans qu’on soit sûr que cela ait été l’intention de l’auteur: Sean Baker perd toute distance critique vis-à-vis d’un personnage de plus en plus veule et égoïste et nous invite, par son découpage, à partager ses fantasmes de subornation de jeune fille. Assez déplaisant. Où l’auteur a t-il voulu en venir avec ce portrait d’un minable qui n’évolue pas d’un iota? La question reste en suspens. Heureusement, il reste l’arrière-plan, brossé avec subtilité, lucidité et tendresse.