Ce merveilleux automne (Mauro Bolognini, 1968)

Dans une maison familiale de la bourgeoisie sicilienne, un jeune homme a une liaison avec sa tante.

Ce thème rebattu, habituellement propice à la nostalgie, est ici traité sans la moindre légèreté mais avec une surdramatisation uniformisante (via la musique étrangement stridente de Morricone, le visage perpétuellement fermé du jeune homme, les inserts qui figurent la pensée du personnage avec beaucoup de schématisme…) qui escamote -tant bien que mal- la faiblesse du récit au prix d’une grave torsion du naturel des scènes. Mais la joliesse floutée des images et Gina Lollobrigida au début de son automne ne sont pas désagréables à regarder.

Cinéma Paradiso (Giuseppe Tornatore, 1988)

Dans un village sicilien, un enfant se lie d’amitié avec le projectionniste.

Une belle idée de cinéma surnage dans un océan de platitudes: celle de la scène « des baisers ». Et encore, car cette idée avait déjà été matérialisée auparavant par Patrick Brion et Francis Lai, avec mille fois plus d’élégance. Car c’est en se vautrant dans la complaisance, la mièvrerie et parfois la vulgarité (cet abus de grand angle pour filmer les visages: n’est pas Leone qui veut) que Giuseppe Tornatore supplée au néant de la dramaturgie et à la faiblesse du récit, beaucoup trop délayé (mal m’en a pris de découvrir ce film dans son « director’s cut » puisque le « director » est un nul). Un cinéphile ne peut que se prendre à rêver à ce que Luigi Comencini aurait réalisé à partir d’un tel sujet.

Frantic (Roman Polanski, 1988)

A Paris, l’épouse d’un médecin américain disparaît.

La substance humaine et émotionnelle du film ne se révèle que dans la dernière séquence. Dommage. Ce qui précède est un jeu de piste un peu vain et dont la crédibilité part en fumée à partir du moment où il est question d’espionnage. Emmanuelle Seigner, en punkette, est très belle.

Des oiseaux, petits et gros (Pier Paolo Pasolini, 1966)

Un homme et son fils errent autour de Rome et rencontrent un corbeau qui leur raconte une histoire médiévale.

Le générique chanté est excellent mais après, c’est globalement nul (à part les pastiches divers et variés de Ennio Morricone). La plate littéralité des symboles n’empêche pas la plus extrême des confusions de régner; à tous les niveaux.

The best offer (Giuseppe Tornatore, 2013)

Un commissaire-priseur misanthrope s’entiche d’une recluse souhaitant faire évaluer un riche patrimoine familial.

L’académisme maniériste de Tornatore s’est mué en splendide classicisme grâce à la finesse d’une narration qui prend son temps, à l’interprétation nuancée de Geoffrey Rush, à la fascinante beauté de Sylvia Hoeks et à une vertigineuse dernière partie qui transforme le suspense brinquebalant en romantisme infini. Les mouvements d’appareil virtuoses et les cadres amples sont toujours justifiés par le point de vue des personnages; l’éblouissement plastique est au diapason de l’action. Cette dilapidation formelle au service d’un récit sophistiqué où les retournements dévoilent les secrets des personnages fait de Giuseppe Tornatore un digne disciple de Sergio Leone d’autant que la musique de Ennio Morricone, en accord parfait avec les images, va parfois jusqu’à insuffler une dimension supplémentaire à ces dernières.

 

L’inconnue (Giuseppe Tornatore, 2006)

Une prostituée ukrainienne échappée des griffes de ses souteneurs se fait embaucher par une famille de bourgeois italiens.

Tornatore tente de revivifier le genre du mélodrame en le frottant à une réalité contemporaine. Le problème est que cette réalité est reconstituée uniquement par des clichés grossiers. L’hyperbole et les effets de manche du montage sont censés impressionner le spectateur.

Bianco, Rosso e Verdone (Carlo Verdone, 1980)

Un père de famille maniaque, un émigré muet et un puceau qui accompagne sa grand-mère se rendent voter.

Ce deuxième film de Carlo Verdone est plus abouti que le premier. Par rapport aux réalisateurs italiens de comédie des décennies précédentes, il a certes abdiqué toute ambition politique, sociologique, historique ou même simplement satirique mais c’est efficace. On se marre pas mal. Le comique est varié: Carlo Verdone fait son miel de crétins divers et mélange comique verbal, comique de situation et burlesque façon Harpo Marx. Grâce à la tendresse de l’auteur, à un joli thème de Ennio Morricone et à la touche de mélancolie finale, les personnages de la grand-mère et du petit-fils sont chargés d’une humanité vraie.

Un sacco bello (Carlo Verdone, 1980)

A Rome, un jour de mois d’août, un hippie retrouve son père à un feu rouge, un électronicien qui vit chez sa mère rencontre une jeune Espagnole qui ne sait pas où dormir et un rocker part avec un ami  à Cracovie pour draguer.

Carlo Verdone est un comique de télé que Sergio Leone lança au cinéma. L’intérêt de son premier film naît plus de ses talents de transformiste (il joue les trois rôles) que de ses talents d’auteur. C’est la queue de comète de la comédie italienne.

Un génie, deux associés, une cloche (Damiano Damiani, 1975)

Un homme manipule un couple d’escrocs pour faire échouer le plan d’un colonel de cavalerie voulant voler des terres aurifères aux Indiens.

La puérilité parodique, typique du western italien en fin de course, n’annihile jamais complètement l’intérêt dramatique parce que le film a la forme d’un déroulé d’action continue et que cette action est mise en scène avec un indéniable brio, fût-il caricatural. Ce ton m’a beaucoup fait songer à Lucky Luke. Malgré la confusion de la narration, accentuée par les aléas de la post-production (des négatifs furent volés), c’est pas si mal.

Seule contre la mafia (‎Damiano Damiani, 1970)

Dans un village sicilien, la fille d’un paysan, d’abord séduite, refuse la cour d’un jeune chef de la mafia…

Inspiré par l’héroïque Franca Viola, Damiano Damiani montre la logique féodale de la mafia en Sicile avec d’autant plus de justesse que lui et les autres scénaristes font preuve d’un sens de la nuance et de la dialectique rares dans le cinéma italien « qui dénonce ». Par exemple, se focaliser sur l’évolution de la famille de la jeune fille face à la menace est une très bonne idée, riche et variée dans ses prolongements dramatiques. Ancrée dans une réalité archaïque représentée crûment (rarement la Sicile fut aussi moche), la confrontation entre cette jeune fille et les traditions infâmes de son pays atteint au mythe. C’est une Antigone moderne qui se révèle sous les traits de Ornella Muti, 14 ans et déjà magnifique de beauté et d’expressivité. Ce n’est pas le moindre des mérites de  Damiano Damiani que de l’avoir révélée au monde. Enfin, la mise en scène est dopée par la musique de Ennio Morricone qui donne leur sens profond à certaines séquences, telle celle du mariage.

Les voleurs de la nuit (Samuel Fuller, 1984)

A Paris, un couple de chômeurs braque les employés de l’ANPE qui les humilient.

Les amusantes grimaces de Claude Chabrol et le thème de Ennio Morricone, qu’il réutilisera de façon magnifique pour La légende du pianiste sur l’océan, sont tout ce qu’il y a à retenir de ce très mauvais film que son absence totale de précision, que ce soit dans le scénario ou la mise en scène, fait régulièrement flirter avec le nanar. Parmi mille autres détails, la façon dont Fuller imagine le train de vie des employés de l’ANPE est particulièrement embarrassante.

Gente di rispetto (Luigi Zampa, 1975)

Dans un village sicilien, l’arrivée d’une jeune et jolie institutrice est accompagnée de morts violentes…

Même si son prétexte ne tient pas debout et que ses articulations manquent de clarté, le récit policier en dit aussi long sur le peuple sicilien et ses ambiguïtés que Le guépard. La fin est terrible en ce qu’elle révèle le doucereux consentement d’une héroïne à l’ordre archaïque. La musique d’Ennio Morricone dramatise une mise en scène par trop désinvolte et Jennifer O’Neill est absolument splendide. Gente di rispetto se laisse voir.

Elle est terrible (Luciano Salce, 1962)

Suite à une panne automobile, un ingénieur italien passe du temps avec une bande de jeunes…

Le surplace du récit, la convention superficielle des caractères, les limites du talent de Catherine Spaak, la grossièreté d’une écriture qui abuse des flash-backs bêtement explicitant et la nullité à peu près totale de la mise en scène font que cette comédie italienne est très justement tombée dans l’oubli.

Qui a tué le chat ? (Luigi Comencini, 1977)

Un frère et une soeur qui ne peuvent pas se voir cherchent à se débarrasser de tous les locataires de leur immeuble pour pouvoir ensuite le vendre.

Comédie italienne particulièrement outrancière et assez mal fichue en termes de narration, la partie policière arrivant comme un cheveu sur la soupe.

Mais…qu’avez vous fait à Solange? (Massimo Dallamano, 1972)

Dans un lycée de jeunes filles, plusieurs élèves sont assassinées…

Du cinéma d’exploitation à la fois racoleur (les scènes de douche collectives entre adolescentes) et moralisateur (l’avortement vu comme le traumatisme ultime). Résolution de l’intrigue éminemment tartignolle, comme il se doit dans ce genre de film. Musique d’Ennio Morricone bonne mais pas très variée.

Le dernier face-à-face (Sergio Sollima, 1967)

Un professeur rejoint une bande de hors-la-loi.

Sollima se sert du cadre westernien pour raconter une fable politique dont l’artifice de la construction est mis en évidence par des ressorts très grossiers. Impossible de prendre au sérieux un revirement aussi brutal que celui de ce professeur humaniste jusqu’à la caricature se mettant à tirer à bout portant dans la gorge des prisonniers. La désinvolture de la mise en scène (que de zooms!) n’aide pas non plus à l’implication dans le drame.