Heartworn highways (James Szalapski, 1981)

Dans les années 70, une bande de jeunes musiciens chevelus débarque à Nashville, capitale de la country.

Heartworn highways est à mi-chemin entre la captation documentaire et le video-clip. Ce n’est pas  à proprement parler un film sur le mouvement outlaw-country. En dehors d’une scène avec un barman du coin qui dit ce qu’il pense de ce nouveau style musical, pas grand-chose de la petite révolution initiée par Townes Van Zandt, Guy Clark et les autres n’y est expliqué. Il n’y a aucune intention didactique. James Szalapski montre les musiciens, au travail et au quotidien. Lorsque ces deux aspects sont intimement liés, cela donne lieu à des séquences sublimes. Ainsi de Townes Van Zandt jouant Waitin around to die sous le porche d’un de ses amis, un vieux Noir, qui ne peut s’empêcher de verser des larmes. Ou alors la séquence finale où une bande d’amis attablés (dont Guy Clark et le tout jeune Steve Earle) sort les guitares et pousse la chansonnette autour des bières et des clopes. Pas d’afféterie, pas d’ornement, juste la chaleur du moment.

Certes, l’absence de ligne directrice est cruelle pour les passages les moins intéressants qui du coup ne sont pas intégrés à un ensemble les transcendant. Les éparses séquences de studio n’étant pas mises en relations avec le reste du processus créatif (au contraire par exemple du One+One de Godard qui montrait celui-ci dans sa continuité) sont purement anecdotiques. L’absence de recul sur son sujet de la part du réalisateur le conduit également à jouer le jeu des artistes les plus fanfarons. Voir le ridicule du concert en prison de David Allan Coe, par ailleurs auteur de très belles chansons.

Hearthworn highways n’en reste pas moins une sorte d’idéal de cinéma. Entre autres du fait de cette absence de mise en perspective des diverses séquences qui le composent, absence qui montre que les auteurs n’avaient pas de discours préétabli, il se dégage du film un puissant parfum d’authenticité, l’impression de voir l’Amérique vraie, c’est-à-dire celle que l’on imagine à travers les fictions de John Ford, Robert Duvall ou Victor Nunez. Cette impression est accentuée par la présence dans le film de séquences sans rapport apparent avec la musique. Des fermiers au boulot. Des vaches qui meuglent sous la neige. Le tout filmé sans esthétisme mais mis en musique avec les chansons qui vont bien.