Maternité éternelle (Kinuyo Tanaka, 1955)

Le triste destin d’une mère de famille qui divorce, écrit des poèmes et se trouve atteinte d’un cancer du sein.

Inspiré de la courte vie d’une poétesse japonaise, Maternité éternelle est un mélodrame transfiguré par la suprême habileté visuelle de la réalisatrice qui a beaucoup progressé depuis Lettre d’amour. C’est par un sens très développé de la situation des personnages dans le plan et par rapport aux éléments du décor (fenêtres, grilles…) qu’elle concrétise, voire symbolise, les situations dramatiques, souvent déchirantes.

Un insondable pessimisme métaphysique, digne de Bergman, est rendu d’autant plus émouvant par l’utilisation d’une musique sentimentale ainsi que par l’attention de la caméra à la beauté du monde. Si le style de Kinuyo Tanaka est un poil plus esthétisant (un poil moins dru) que celui de Mizoguchi, comment résister au prolongement d’un travelling qui, après avoir suivi un couple de marcheurs dans la grande tradition nippone, les recadre de façon à composer une image avec les arbres immenses et le fleuve à l’arrière-plan? Ce prolongement du mouvement de la caméra est aussi inutile à l’action filmée qu’enchanteur pour les yeux. Il accroît aussi, indirectement, la mélancolie du récit. Pour autant, la réalisatrice manie aussi la crudité (plan sur les seins dans le bloc opératoire) et des procédés aux confins du fantastique (l’entrée de la morgue) avec beaucoup d’à-propos.

Bref, une grande découverte, tellement supérieure dans sa forme et sa puissance d’évocation à Nuages flottants par exemple (la belle présence de Masayuki Mori accentue la réminiscence).

Lettre d’amour (Kinuyo Tanaka, 1953)

Cinq ans après la capitulation, un Japonais qui gagne sa vie en écrivant des lettres d’amour à des soldats américains retrouve sa fiancée de jeunesse parmi ses clientes.

Le sujet est fort intéressant mais son traitement est poussif, monotone et un brin alambiqué. Malgré quelques jolis plans où les personnages sont bien intégrés au décor urbain, Kinuyo Tanaka réalisatrice n’a pas la grandeur de Kinuyo Tanaka comédienne.