Hommage au lieutenant-général Lewis Puller dit Chesty, soldat le plus décoré des Marines.
Le dernier film de John Ford n’est pas Frontière chinoise mais Chesty: a tribute to a legend. La commande venait d’un mécène désirant rendre hommage au héros des Marines. Il y a lieu de croire qu’avec un tel cahier des charges, Ford, quoique physiquement diminué, se soit senti comme un poisson dans l’eau. Il appela John Wayne pour raconter la vie du vétéran, se filma entrain de causer avec Puller, qu’il eut l’heur de côtoyer à Guadalcanal, et entrecoupa le tout d’archives de guerre souvent tournées par lui. Il existe deux montages: l’un de 28 minutes, l’autre de 47 minutes. La version longue étant gorgée d’images de bataille superfétatoires, le cinéaste a affirmé préférer la version courte. C’est celle que j’ai vue.
C’est un joli film, pas avare en séquences typiquement fordiennes, telles celle où Puller se recueille sur la tombe du général Lee, celle où il va chercher son courrier, celle où il assiste à une parade en son honneur. La mélancolie se traduit alors par les visages de ses soldats qui apparaissent en surimpression. C’est émouvant. Ce qui empêche quand même cet ultime opus de figurer parmi les oeuvres majeures du maître, c’est l’obséquiosité patriotique qui y prend le pas sur la profondeur du regard: Chesty apparaît très diminué à l’image mais jamais n’est évoquée une cause essentielle à cet affaissement physique: le destin de son fils, gravement mutilé au Viet-Nam un an avant le tournage. Une telle évocation aurait certes apporté un salutaire contre-champ à cette demi-heure d’apologie militariste. Mais ce n’était évidemment pas l’objet de la commande. Et pas sûr que ça aurait fait plaisir à Chesty.