L’accession au commandement effectif d’un lieutenant frais émoulu au sein du bataillon français de l’ONU en Corée.
Contrairement à ce que disent Wikipédia et l’Académie des Oscars, Crèvecoeur n’est pas à proprement parler un documentaire. Quoique produit par le ministère de la Défense dans un but didactique, c’est une fiction avec un début, un milieu et une fin où les soldats disent un texte écrit d’avance. C’est d’ailleurs ici que le bât blesse. En effet, ces textes sonnent faux à double titre: d’abord, leur visée pédagogique leur ôte parfois toute vérité humaine; ensuite, ils sont dits sans grande conviction par des interprètes dont ce n’est certes pas le métier. C’est dommage car, outre que Crèvecoeur éclaire un pan tout à fait méconnu de l’histoire militaire française, l’oeuvre possède un ton qui la rend attachante. Digne, lucide et désenchantée, notamment en ce qui concerne les rapports avec la métropole, elle est plus fordienne dans l’esprit que le propre film de John Ford sur la guerre de Corée. Les teintes ocres du Gevacolor accentuent cette mélancolie diffuse. Absent de la mémoire collective pour des raisons politiques (son réalisateur a eu sa carrière brisée après s’être associé au putsch des généraux d’Alger), Crèvecoeur gagnerait à être redécouvert ne serait-ce que parce que c’est un des très rares bons films de guerre français.