Dans un quartier pauvre de Berlin, une mère de famille sous-loue à un souteneur avec sa prostituée…
Film dans la lignée de La rue sans joie ou Telle est la vie mais avec un engagement politique plus marqué: ce sont les luttes ouvrières aux côtés de son amoureux qui, peut-être, sauveront la jeune fille de sa misère. La filiale allemande d’une société soviétique produisit ce Mutter Krausens fahrt ins Glück (film préféré de Fassbinder, paraît-il). Après avoir été communiste, Phil Jutzi rejoignit le parti nazi en 1933…Il n’en a pas moins réalisé ce classique du cinéma prolétarien avec un remarquable talent, tout de précision et d’observation. De larges aperçus de la vie du quartier (travaux de goudronnage, fête foraine, circulation…) aèrent et enracinent la tragédie sociale. Cette tragédie est nourrie par l’attention de la caméra aux détails concrets, aux objets du quotidien, notamment dans la terrible séquence du suicide. Les espaces clos (appartement, cages d’escalier…) sont restitués avec clarté et les passages formalistes ou expressionnistes sont rares et s’intègrent assez naturellement (scène de manège, ce poncif). La caractérisation des personnages ne brille pas par sa complexité et le jeu d’Alexandra Schmitt est quelque peu uniforme dans son expression de la résignation mais la jeune Ilse Trautschold a une beauté très moderne et les scènes où elle rejoint son amoureux rouge apportent un lyrisme qui, quoiqu’artificiel dans sa conception, réussit à compenser le morne fatalisme de l’oeuvre.