Le pays bleu (Jean-Charles Tacchella, 1977)

Dans un village du sud de la France, une infirmière vaguement hippie s’entiche d’un transporteur de légumes.

Encore une fois, l’absence de point de vue de Jean-Charles Tacchella amène son film à s’éparpiller et à ne rien raconter d’un tant soit peu consistant. Par exemple, faute d’être justifiée, la grossière séquence où le personnage de Brigitte Fossey insulte le restaurateur ne peut provoquer chez le spectateur que, au mieux, la circonspection, ou, au pire, le mépris envers une telle bécasse hystérique. Le souci est que dans la séquence d’après, Tacchella fait comme si de rien n’avait été, nous la présentant à nouveau comme son héroïne à laquelle nous devrions nous attacher. Le fossé entre les urbains venus se mettre au vert après mai 68 et les authentiques ruraux aurait pourtant pu donner lieu à un film intéressant mais contrairement à ce qui se passe chez les vrais bons réalisateurs de comédie, il n’y a ici aucune fluidité, aucune continuité, aucune cohérence, entre la satire (pas étayée) et la tendresse. D’où l’impression que l’auteur ne sait pas où il va. On ne peut même pas dire que ses incohérences sont « à l’image de la vie » car, à l’indigence de l’écriture s’ajoute le plaquage d’une musiquette hors de propos qui contribue grandement à accroître la fausseté de ce qui nous est montré et qui révèle in fine le mépris total du créateur envers ses créatures. Finissons enfin par noter que, bien que les personnages s’exclament à plusieurs reprises sur la beauté de leur région, jamais le spectateur ne constate cette beauté tant Tacchella semble incapable de la restituer dans ses images.

Travelling avant (Jean-Charles Tacchella, 1987)

En 1948, deux cinéphiles parisiens rêvent de rentrer dans le milieu du cinéma.

Reconstitution de l’âge d’or de la cinéphilie française qui sonne d’autant plus juste qu’elle prend en compte la face sombre de son sujet: la mélancolie, l’inaptitude à vivre, qui conduit le héros à une quasi-clochardisation. Ainsi, Thierry Frémont, une révélation, est durement émouvant. Ann-Gisel Glass est très bien en jeune fille endeuillée. Malgré quelques raccourcis scénaristiques (comment deux filles peuvent-elles s’enticher de pareil tocard?), des dialogues trop signifiants et une utilisation de la musique parfois contre-productive, Travelling avant est un joli film.

 

Cousin cousine (Jean-Charles Tacchella, 1975)

S’étant rencontrés à un mariage où leurs conjoints ont couché ensemble et faisant désormais partis de la même famille, un homme et une femme nouent une amitié de plus en plus amoureuse.

Un film très déplaisant. Oeuvre irresponsable, Cousin cousine n’est rien d’autre qu’une apologie de l’égoïsme pulsionnel. Ce qui est scandaleux n’est pas tant qu’une femme abandonne son enfant pour aller s’enfermer avec un homme marié dans une chambre d’hôtel de passe mais l’absence de point de vue affirmé de Jean-Charles Tacchella sur cet acte. Pas assez précise dans ses observations pour être satirique, dénuée de lyrisme romantique comme de sensualité érotique, la mise en scène se cantonne à l’étalage complaisant d’une médiocrité généralisée. Un exemple: une fois enfermés, les amants sont plus souvent montrés entrain de médire sur leurs conjoints trompés qu’entrain de faire l’amour! Comment alors s’identifier à eux, éprouver une quelconque sympathie à leur encontre?

La mauvaise post-synchronisation, la relative médiocrité des acteurs (sauf Guy Marchand) et la plate rigidité des cadres font apparaître des séquences de groupe se voulant renoiriennes comme très mécaniques. Par-dessus tout, la très envahissante musiquette façon cirque ôte toute vérité dramatique et laisse penser -par exemple dans la séquence où Guy Marchand s’empare d’un pistolet- que l’auteur lui-même se foutait pas mal de ses personnages et de ce qu’il était censé mettre en scène.