Ce merveilleux automne (Mauro Bolognini, 1968)

Dans une maison familiale de la bourgeoisie sicilienne, un jeune homme a une liaison avec sa tante.

Ce thème rebattu, habituellement propice à la nostalgie, est ici traité sans la moindre légèreté mais avec une surdramatisation uniformisante (via la musique étrangement stridente de Morricone, le visage perpétuellement fermé du jeune homme, les inserts qui figurent la pensée du personnage avec beaucoup de schématisme…) qui escamote -tant bien que mal- la faiblesse du récit au prix d’une grave torsion du naturel des scènes. Mais la joliesse floutée des images et Gina Lollobrigida au début de son automne ne sont pas désagréables à regarder.

Le bel Antonio (Mauro Bolognini, 1960)

A Catane, l’impuissance d’un soi-disant séducteur met en péril son mariage arrangé avec une fille sublime.

La satire du patriarcat sicilien recèle des moments amusants dont le meilleur est l’ellipse de la mort du père, sommet d’humour noir. La mise en scène de Mauro Bolognini met bien en valeur les jolis décors intérieurs mais elle est un peu amidonnée. Assumer pleinement le genre comique en insufflant plus de mordant et de vivacité n’eût pas nui à la force dramatique. Les acteurs -en particulier Pierre Brasseur- sont très bons mais on ne voit pas assez Claudia Cardinale (alors qu’on voit beaucoup Marcello Mastroianni).

Le plus vieux métier du monde (Claude Autant-Lara, Mauro Bolognini, Philippe de Broca, Franco Indovina, Michael Pfleghar et Jean-Luc Godard, 1967)

A la Préhistoire, dans l’Antiquité romaine, pendant la Révolution française, à la Belle époque, de nos jours et dans le futur, l’histoire de la prostitution vue à travers six sketches.

Ça va du très nul (la Préhistoire selon Franco Indovina) jusqu’au pas mal (la Révolution française par de Broca ou la Belle-époque par Michael Pfleghar) en passant par le bellement improbable (l’anticipation de Jean-Luc Godard dans la droite lignée de Alphaville).

Le Mauvais Chemin (La Viaccia, Mauro Bolognini, 1960)

A la fin du XIXème siècle, un jeune paysan italien légataire de son riche oncle s’amourache d’une prostituée.

La viaccia est un mélodrame romanesque qui confronte la ville à la campagne, les bonnes gens aux prostituées, la famille au bordel. Les oppositions sont relativement subtiles, les personnages plutôt bien dessinés. A l’exception d’une fin exagérément pathétique, les péripéties sont crédibles. Bref, le film est d’une facture tout ce qu’il y a de plus honorable. Il est simplement dommage qu’elle soit aussi académique. Le style précieux de Bolognini n’a pas encore atteint sa plénitude. Ici, les décors et les costumes sont soignés, la photographie est belle (j’ai songé à la peinture hollandaise devant certaines scènes de rue) mais la rigidité de la mise en scène n’est jamais dépassée, elle ne crée jamais de mélancolie comme dans les quelques grands films que le cinéaste réalisera par la suite (L’héritage). La faute peut-être à une musique banale qui ne donne aucun relief aux images, une musique à l’opposé des bandes originales qu’Ennio Morricone composera pour Bolognini dans les années 70. La faute aussi à des dialogues trop littéraires compte tenu des personnages qui les prononcent. La faute enfin au doublage de Claudia Cardinale, d’une fadeur insultante pour la bella donna.

Libera mon amour (Mauro Bolognini, 1974)

Un film étrange, qui à travers une héroïne délibérement caricaturale (elle s’appelle Libera Anarchia) et une mise en scène frôlant le grotesque montre l’apparente normalité du fascisme et surtout la névrosité apparente des légitimes insoumis.

Les images d’archives qui reviennent régulièrement sont un contrepoint aussi glaçant que pertinent à un début assez comique. Des moments touchants dûs notamment à la musique de Morricone même si on peut regretter que tout ça paraisse parfois désincarné en dépit d’une magnifique Claudia Cardinale dans le rôle titre et de très bons seconds rôles, la narration et l’évolution psychologique de ses personnages n’étant a priori pas le souci majeur de Bolognini qui se préoccupe plus sur ce film de son propos politique et du symbolisme de sa mise en scène.