J’étais une aventurière (Raymond Bernard, 1938)

Une aventurière qui vole de riches messieurs tombe amoureuse d’une de ses proies…

J’étais une aventurière est sans doute le film français le plus lubitschien qui n’ait jamais été tourné. Tout le début où l’on voit le trio d’escrocs voler la haute-société grâce à des plans plus sophistiqués les uns que les autres est comme une sorte de Haute-pègre revu par un scénariste -Jacques Companeez- découvrant le principe des séries américaines avec trente ans d’avance. Il y a en effet du Mission:impossible dans cette écriture qui mise sur la surprise créée par l’intelligence diabolique de professionnels de la manipulation mondaine pour faire jubiler le spectateur. Comme dans une série, plusieurs variations autour de ce thème sont présentées et à chaque fois, la virtuosité des personnages/auteurs est telle que le spectateur s’y laisse prendre.

Cette fascinante mécanique dérape à partir du moment où des sentiments naissent chez l’héroïne. Ce décisif basculement vers l’irrationnel (ses compères ne comprennent évidemment pas leur collègue) est rendu sensible par le talent du cinéaste qui ose et réussit une séquence d’un lyrisme juste et grandiose. Grâce à leur inventivité, à la justesse de leur ton et à leur inébranlable respect des situations et des personnages (à l’exception du dernier plan un brin démagogique), Jacques Companeez, Raymond Bernard et les acteurs -tous parfaits- ont su donner du corps aux diverses conventions narratives qui régissent leur ouvrage. Léger et brillant, J’étais une aventurière est ainsi un parfait exemple de la belle santé du cinéma français d’avant-guerre.

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