Les roseaux sauvages (André Téchiné, 1994)

Dans une petite ville du Sud-Ouest au début des années 60, une jeune communiste, un pied-noir, le frère d’un soldat en Algérie et le narrateur qui se découvre homosexuel préparent le bac…

Rarement les émotions intimes auront été articulées à la grande Histoire avec un tel tact. On se doute bien que le coeur d’André Téchiné penche à gauche pourtant l’auteur se fait fort de montrer les dramatiques conséquences de la lâcheté d’une enseignante communiste en même temps qu’il fait de son jeune sympathisant de l’OAS un héros digne de Jean-René Huguenin. Ce qui compte ici, ce sont les individus, leurs blessures, leurs passions; tous regardés avec un infini respect par le cinéaste. Rien n’est plus beau que ces adolescents qui s’abstraient du déterminisme sociologique pour s’abandonner à leurs élans profonds dans une épiphanie à la sensualité renoirienne. Les reflets du soleil sur la rivière, la justesse des jeunes comédiens, le charme singulier d’Elodie Bouchez et, surtout, la délicatesse du découpage concourent à faire de la longue séquence finale un moment grand et sublime du cinéma français. Les roseaux sauvages est un film bouleversant.