Pain, amour, ainsi soit-il (Dino Risi, 1955)

Muté dans sa ville natale de Sorrente, le maréchal des carabiniers Carotenuto rejoint son frère curé et a affaire à une jolie poissonnière refusant d’être expulsée de sa maison.

Suite de Pain, amour et jalousie où Sophia Loren remplace Gina Lollobrigida. Le décor naturel du village méditerranée est joliment restitué grâce à l’ample clarté du découpage et à l’Eastmancolor. Mais c’est bien le seul intérêt de ce film au scénario indigne de ses deux prédécesseurs.

Vive Henri IV…vive l’amour! (Claude Autant-Lara, 1961)

Pour mieux pouvoir la séduire, Henri IV arrange la mariage de mademoiselle de Montmorency avec le prince de Condé…

Le cabotinage des uns et des autres peine à enlever une mise en scène désolante d’académisme. Dommage, le récit, habilement inspiré d’une des anecdotes les plus piquantes du règne du Vert galant, aurait pu donner lieu à une savoureuse comédie historique.

Il vigile (Luigi Zampa, 1960)

Après avoir harcelé le maire pour obtenir le poste, un chômeur devient enfin motard…

Encore une fois, Alberto Sordi s’avère l’acteur idéal pour Luigi Zampa tant il incarne avec humanité la veulerie et l’opportunisme. L’auteur se fait ici le contempteur acéré d’une certaine tendance de la société italienne: passe-droits et petits arrangements font le miel de tout le monde, du chômeur au maire (excellent Vittorio de Sica) en passant par la vedette de passage en ville (cocasse apparition de Sylva Koscina dans son propre rôle). La drôlerie perpétuelle n’empêche pas l’amertume sous-jacente d’affleurer ici et là. La justesse maintenue de l’écriture et le naturel de la mise en scène évitent que les personnages de cette fable implacable ne soient réduits à des caricatures. Seule la scène du tribunal trahit quelque peu la vérité psychologique du (anti)héros. Elle n’empêche pas Il vigile de s’avérer un joyau méconnu de la comédie italienne.

Le signe de Vénus (Dino Risi, 1955)

Une dactylographe cherche le grand amour en compagnie de sa cousine, canon de beauté.

Le signe de Vénus est une sorte de transition entre les téléphones blancs et la comédie italienne des années 60. En plus d’être relativement ancrée dans la société de l’époque, la mise en scène du canevas à l’eau de rose -des jeunes femmes qui rêvent du prince charmant- a des accents satiriques; à l’image de la métamorphose de Vittorio de Sica, bellâtre emblématique de la comédie mussolinienne, en séducteur minable. L’inspiration comique est plus timide qu’elle ne le sera dans les chefs d’oeuvre ultérieurs de Risi mais le film étonne plusieurs fois par sa dureté assumée et son refus des conventions. Ainsi de la frappante amertume du plan final. De plus, la distribution est remarquable.

L’avventuriera del piano di sopra (Raffaello Matarazzo, 1941)

Pendant que son épouse est partie dans sa famille, un avocat accueille chez lui sa voisine persécutée par son mari…

Brillant succédané de comédie américaine sophistiquée, L’avventuriera del piano di sopra est peut-être le film le mieux écrit de Matarazzo. A partir du moment où le récit dévie vers l’enquête sur un vol de bijoux, on songe évidemment à Lubitsch. Non que ce film ait la grâce des chefs d’oeuvre du maître berlinois mais les quiproquos s’y agencent à merveille dans une intrigue pleine de malice. Les acteurs sont charmants. Le drame du mâle moyen esseulé est traité avec une ironie plus tendre moins non moins précise que celle de Billy Wilder dans Sept ans de réflexion quinze ans plus tard. Très plaisant.

Pain, amour et fantaisie (Luigi Comencini, 1953) Pain, amour et jalouisie (Luigi Comencini, 1954)

Un maréchal des logis est affecté dans un village pauvre de l’Italie montagneuse. Ce vieux beau célibataire va être l’objet de l’attention des commères…

Ce merveilleux diptyque marque l’avènement du renouveau de la comédie italienne. Dans un environnement que l’on peut qualifier de « néo-réaliste », Luigi Comencini et ses scénaristes convoquent les éternels schémas de la comedia dell’arte avec une incomparable virtuosité. Le trait est moins acerbe qu’il ne le sera plus tard dans le genre car  la bienveillance de Comencini pour ses personnages est totale et le ton est globalement joyeux. Cela n’empêche pas les auteurs, et c’est là leur génie, de montrer toute la misère économique, sociale et morale qui pèse sur les villageois. Voir ainsi comment dans le second volet les vieilles traditions empêchent l’harmonie des coeurs promise par la fin du premier épisode. Je crois d’ailleurs que c’est un cas unique dans l’histoire du cinéma que ce happy end d’un film qui se voit remettre en cause par la suite de ce film.

Le récit est riche, plein d’intrigues qui s’emmêlent tout en étant mené avec concision. Les personnages sont denses et formidablement interprétés. Vittorio De Sica trouve ici son meilleur rôle d’après-guerre et Gina Lollobrigida son meilleur rôle tout court. L’humour n’empêche pas la prise au sérieux des tourments des protagonistes ni le surgissement de l’émotion. Bref, c’est du grand et beau cinéma populaire, mille coudées au-dessus du contemporain Don Camillo. Pain, amour et fantaisie et Pain, amour et jalouisie sont deux classiques en quelque sorte parfaits qui ne sont pas appelés à vieillir.

Je donnerais un million (Mario Camerini, 1935)

Un milliardaire dégoûté par ses semblables rencontre un clochard désespéré alors que tous deux allaient se jeter au fleuve. Le milliardaire dit à son nouvel ami qu’il serait prêt à donner un million à qui lui redonnerait foi en l’humanité.

L’idée de départ est donc marrante. La scène d’introduction rappelle celle des Lumières de la ville. On aurait pu croire à une comédie grinçante façon Dino Risi trente ans avant l’heure. Malheureusement, on a en fait affaire à un film plat et niais, typique de l’ère fasciste. Le charme de Vittorio De Sica acteur ne suffit pas. Comme dans d’autres comédies de la période, la morale est un peu rance: il est bon que chacun reste à sa place. Ici, la fête foraine suffit aux prolos.

I nostri sogni (Vittorio Cottafavi, 1943)

Un petit escroc se fait passer pour le fils du patron d’un grand magasin et tente de séduire la fille d’un employé.

Sans appartenir strictement parlant au courant des « téléphones blancs« , I Nostri sogni est une comédie niaise et aseptisée réalisée correctement mais sans grand intérêt. La morale finale (chacun doit rester à sa place) est bien celle d’un film fasciste.

Madeleine, zéro de conduite (Vittorio De Sica, 1940)

Dans un collège pour filles, mademoiselle Elisa enseigne l’écriture commerciale. Toutes les lettres des exercices sont adressées à un magnat viennois. Un jour, une élève poste une lettre écrite par sa professeur or mademoiselle Elisa profite de ces lettres pour s’épancher et confier ses rêves de prince charmant…

Madeleine, zéro de conduite fait partie des « téléphones blanc », ces films de collège de filles tournés sous le fascisme. Ces produits de studio se caractérisent par un artifice total et une oblitération complète de la réalité sociale. Les problèmes de coeur des adolescentes et leurs relations avec des adultes incompréhensifs constituent les principaux enjeux dramatiques. La comédie se base ici sur les quiproquos et s’avère assez charmante. Une fois que l’on accepte les conventions, on se rend compte que le film n’est pas si niais et que son sujet est en fait le printemps d’une vieille fille. La mise en scène est banale mais bénéficie du charme de De Sica comédien.