Les conspirateurs (Luigi Magni, 1968)

En 1825 à Rome, deux carbonari sont arrêtés pour avoir tenté d’assassiner un mouchard…

Malgré une distribution exceptionnelle et une musique lyrique, morriconienne en diable, de Armando Trovajoli, cette tragicomédie historique est ratée à cause d’une mise en scène faiblarde: l’inexistence à l’écran du décor romain, les artifices théâtraux de l’écriture qui régulièrement ramènent la comédie historique vers le vaudeville, le rythme mou et l’échec quant à la variation des registres ambitionnée (la perpétuelle gravité de Robert Hossein plombe le comique) désintéressent rapidement le spectateur.

Play-boy party (Dino Risi, 1965)

Un ingénieur rejoint son épouse dans une station balnéaire bondée…

Dino Risi profite évidemment d’un tel sujet pour se moquer des masses en vacances mais il n’appuie pas la caricature. Sa satire s’exprime surtout avec les plans de la plage bondée, avec des détails amusants au détour des scènes et avec le moyen purement plastique qu’est l’utilisation de la couleur, délibérément criarde. L’histoire du couple confronté à diverses tentations est racontée sans lourdeur, à travers des séquences autonomes et distendues représentant souvent des fêtes où on entend la délicieuse variété italienne de l’époque. Le pessimisme pré-houellbecquien de la vision de l’amour est nuancé par la fin. Encore que je ne vois rien de précis à reprocher à Enrico Maria Salerno, peut-être manque t-il à L’ombrellone un acteur principal de la trempe de Ugo Tognazzi ou Vittorio Gassman et, aussi, un script plus consistant, pour se hisser à la hauteur des meilleurs films de Dino Risi. En l’état, c’est une bonne comédie italienne, représentative de son époque (l’âge d’or du genre) et de son auteur (le meilleur du genre).

L’armée Brancaleone (Mario Monicelli, 1966)

Ayant par hasard récupéré le titre de possession d’un fief, une bande de manants entraîne un chevalier désargenté dans une drôle d’équipée…

L’armata Brancaleone est peut-être le chef d’oeuvre de Mario Monicelli. Pour une fois, le ridicule de ses protagonistes n’apparaît pas comme une mesquine facilité. Est-ce dû au contexte temporel? Le fait est que le mélange de crudité démystificatrice et de fantaisie grotesque de la mise en scène donne une assez juste idée de l’époque représentée et fait de cette comédie un des meilleurs films sur le Moyen-âge. L’épisode de la croisade des gueux avec le leader halluciné qui ne parle qu’en criant est particulièrement bien senti.

Toutefois, L’armata Brancaleone ne serait pas un film très intéressant (ni très courageux) s’il se contentait de brocarder un obscurantisme millénaire. Au-delà de la verve satirique et burlesque qu’ils déploient avec une grande inventivité, Age, Scarpelli et Monicelli savent accorder à leurs personnages une dignité salvatrice. Ainsi Brancaleone, superbement interprété par Vittorio Gassman, est bête mais a le coeur noble. Il se comporte à plusieurs reprise tel Don Quichotte. D’ailleurs, ce récit picaresque qui entraîne les personnages dans différentes aventures -cocasses, effrayantes voire émouvantes- est sans doute le plus parfait équivalent cinématographique à l’absolu chef d’oeuvre de Cervantès (quoique sans la dimension réflexive de sa deuxième partie).

Derrière la dérision, le profond respect des auteurs pour leur matière est également tangible dans la façon dont ils restituent la campagne italienne: ses paysages, ses églises et ses villages ont, mine de rien, rarement été aussi bien filmés. L’équilibre pictural de plusieurs plans participe de la nature profondément classique de cette farce qui, entre autres rares plaisirs, donne l’occasion de voir Gian Maria Volonte nanti d’une coupe de douilles lui donnant des airs à la Régis Laspalès.

Je la connaissais bien (Antonio Pietrangeli, 1965)

Une ouvreuse de cinéma tente de devenir actrice en fréquentant les milieux mondains…

La confusion du découpage, l’absence de progression dramatique et la distance entretenue par l’auteur vis-à-vis de personnages fondamentalement inintéressants expliquent sans doute pourquoi cette pâle vulgarisation de La dolce vita est tombé dans un oubli aussi profond que juste.